
Notions sur l’engagement du porte-fort
Définition
En Belgique, le mécanisme du porte-fort est le contrat par lequel une personne, le porte-fort va s’engager envers quelqu’un, le bénéficiaire, à ramener le consentement ou la ratification d’une tierce personne envers son cocontractant à exécuter une prestation déterminée.
Cette institution juridique est désormais consacrée à l’article 5.106 du code civil.
Exemple
A s’engage envers B, gravement malade, à ce que le médecin C très réputé, le prenne en charge et fasse de son mieux pour guérir sa maladie. Sauf que C n’a encore aucune connaissance de l’existence ni de A, ni de B au moment de la conclusion du contrat.
Il y a donc bel et bien un contrat entre A et B (de porte-fort) mais celui-ci créerait en réalité des obligations dans le chef de C prima facie.
Limites de l’engagement du porte-fort
Principe
En principe, tout contrat nécessite le consentement des deux (ou plusieurs) parties. Il s’agit de l’essence même du contrat qui se distingue même, de par cet élément, de l’acte juridique unilatéral. Le consentement est donc ce qui justifie la création d’obligations entre les parties aux contrats, étant lui-même une source d’obligations.
Le principe de la relativité des effets internes des contrats
Un contrat peut-il créer des obligations (ou des droits) dans le chef d’un tiers au contrat ?
Telle est la question qui se pose concernant l’engagement du porte-fort. En effet, en se portant-fort de rapporter le consentement d’une tierce personne, on pourrait y voir une dérogation au principe de la relativité des effets internes des contrats.
Rappelons que l’article 5.103 du code civil dispose que « le contrat ne fait naître des obligations qu’entre les parties ». Il s’agit de la consécration du principe mentionné ci-dessus. Dès lors, il n’est pas possible d’exiger l’exécution forcée d’une obligation née d’un contrat envers un tiers.
Un compromis particulier
Quelle solution doit-on retenir si l’existence du contrat de porte-fort est reconnue par notre code civil mais que le principe de relativité vient (à première vue) en limiter l’application ?
En réalité, le tiers dont le porte-fort a promis de ramener l’engagement ou la ratification envers son cocontractant n’est jamais tenu d’accepter cette « obligation ». Il a donc le droit d’accepter mais également de refuser d’exécuter la prestation ou de ratifier l’acte en cause.
Les effets du mécanisme de porte-fort
Entre le porte-fort et le bénéficiaire
S’agissant d’un contrat unilatéral, l’obligation naissant de celui-ci consiste simplement dans le fait de ramener l’engagement ou la ratification du tiers.
Par exemple : A ne s’engage en réalité pas à ce que B soit soigné mais uniquement à ce que C (le médecin) s’engage envers A à le soigner. La nuance est fine, mais les effets en sont particulièrement affectés.
En effet, puisque le porte-fort ne s’est pas engagé à exécuter la prestation, il ne pourra jamais être contraint (en justice) à exécuter lui-même la prestation dont il avait promis l’exécution du tiers.
Par exemple : B ne pourra pas contraindre A à le soigner lui-même ou à trouver une autre personne que C à exécuter la prestation si ce dernier refuse.
Si le tiers refuse de s’exécuter, le bénéficiaire pourra cependant engager la responsabilité contractuelle du porte-fort en demandant la réparation du dommage causé. La plupart du temps, cette réparation aura lieu sous la forme de dommages-intérêts. C’est la solution qui ressort du deuxième alinéa de l’article 5.106 du code civil.
Entre le porte-fort et le tiers
Aucun contrat n’existe entre ceux-ci.
- Si le tiers accepte, celui-ci est tenu à une véritable obligation envers le bénéficiaire. Le porte-fort est alors déchargé (ayant exécuté son obligation contractuelle) et celui-ci s’efface.
- Si le tiers refuse, aucune action ne peut être intentée contre le tiers et inversement.
Entre le bénéficiaire et le tiers
Aucun contrat n’existe entre eux également originellement.
- Cependant, si le tiers accepte d’exécuter la prestation ou de ratifier l’acte, il est personnellement engagé envers le bénéficiaire.
S’il s’agit d’une ratification, celle-ci rétroagit jusqu’à la date de conclusion du contrat de porte-fort (article 5.106, al. 3.)
Par exemple : si A s’engage envers B le 1er janvier à ce que C ratifie un contrat de vente et que C ratifie la vente le 15 janvier, le contrat de vente sera réputé s’être formé le 1er janvier et non le 15.
Distinction entre le mécanisme du porte-fort et d’autres institutions
La stipulation pour autrui
La stipulation pour autrui peut s’analyser comme étant « l’antichambre » du porte-fort. Il ne s’agit ici pas de créer des obligations dans le chef du tiers mais bien des droits.
Par exemple : A s’engage envers B à payer des indemnités d’assurance à C si B venait à décéder. Il s’agit du principe de l’assurance-vie très courante en pratique.

Le contrat de mandat
Le mandat suppose la représentation du mandant par le mandataire. Dans le cas du porte-fort, ce dernier ne représente cependant ni le bénéficiaire, ni le tiers.
Conclusion
Le mécanisme du porte-fort opère donc un judicieux compromis entre le principe de la relativité des effets internes des conventions et la création d’obligations dans le chef d’un tiers. Cette institution est pourtant fréquente en pratique, il convient donc de bien comprendre son fonctionnement.
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