
Notions
Définition
La condition suspensive est l'élément futur et incertain qui affecte l'exigibilité d'une obligation.
La condition en général
Comme l’énonce l’article 5.139 du code civil, la condition est un évènement futur et incertain (par exemple : l’octroi d’un prêt hypothécaire à la banque). En droit belge, on distingue deux formes de conditions : la condition suspensive et la condition résolutoire (voir ci-dessous).
L’exigibilité
L’obligation est réalisée sous condition suspensive lorsque c’est son exigibilité qui est conditionnée.
Mais quelle différence existe-il entre l’existence et l’exigibilité d’une obligation ? Illustrons cette distinction au travers d’un exemple :
A, vendeur, conclut un contrat de vente d’un bien immobilier le 1er janvier avec B, acheteur, sous la condition suspensive que ce dernier obtienne un prêt hypothécaire. B obtient son prêt le 1er juin de la même année. Entre le 1er janvier et le 1erjuin, le contrat existe bel et bien mais les parties ne peuvent exiger en justice l’exécution du contrat avant que la condition se réalise.
Différences entre la condition suspensive et la condition résolutoire
Bien que dans les deux cas l’obligation soit conditionnée par un évènement futur et incertain, les effets sont bien différents dans les deux cas. L’une conditionne l’exigibilité alors que l’autre conditionne l’extinction de celle-ci. En ce qui concerne celle faite sous condition suspensive existe bel et bien mais son exigibilité est conditionnée par la survenance de l’évènement.
L’obligation sous condition suspensive existe donc bel et bien pendente conditione (lorsque la condition n’est pas encore réalisée) mais ne sera pas exigible durant ce temps.
A contrario, l’obligation passée sous condition extinctive existe également pendente conditione mais elle est également exigible durant ce temps. Mais alors quel est l’intérêt de la condition me direz-vous ? Si l’évènement conditionnant l’extinction de l’obligation se réalise, celle-ci s’éteindra rétroactivement.
Par exemple : A, employeur, passe un contrat de travail avec B, sous la condition résolutoire que l’employé remplacé par B revienne de son congé maladie à durée indéterminée. Si l’employé revient de sa convalescence, le contrat de travail de B prendra fin par l’effet de la réalisation de la condition. Cependant, puisque le contrat de travail est toujours un contrat à prestations successives (qui s’échelonne dans le temps), il n’y aura aucune rétroactivité attachée à la résolution du contrat (il ne devra pas rendre son salaire par exemple).
Différences entre la condition et le terme
Il existe également une autre institution dans notre ordre juridique : le terme. Tout comme la condition, il existe le terme suspensif et le terme extinctif.
Le terme est également un évènement futur mais à la différence de la condition, il s’agit d’un évènement certain. On connait la date d’échéance de cet évènement.
Par exemple : le contrat de travail de B s’achèvera le 1er janvier de l’année qui suit celle de la conclusion du contrat. Le 1er janvier est un évènement futur et certain car à moins que la fin des temps ne survienne d’ici là, cette date arrivera à échéance.
La validité de la condition
Pour qu’une condition soit valable il faut que certaines conditions soient respectées. Celles-ci valent donc également pour la condition résolutoire.
Doit être licite et possible
La condition doit avoir un objet licite et possible. C’est la défaillance de la condition qui s’applique si l’objet de la condition présente un tel caractère.
Par exemple : le contrat de donation fait sous la condition suspensive que l’une des deux parties tue une autre personne, est illicite.
Ne doit pas être purement potestative
Cette condition est prévue par l’article 5.141, alinéa 1, traitant de la condition potestative. La condition purement potestative est celle dont la réalisation ne dépend que du consentement de celui qui s’oblige. Une telle condition est interdite puisque c’est la volonté exclusive du débiteur qui conditionnerait l’exigibilité de l’obligation.
Par exemple : j’achète votre maison, si je le souhaite. La réalisation de la condition (vente de l’appartement) ne dépend que de la volonté du débiteur, il s’agit d’une condition purement potestative.
Au contraire, les conditions simplement potestatives sont quant à elles licites. Il s’agit de celles dont la réalisation suppose que le débiteur fasse plus qu’exprimer sa volonté. Il faut également qu’il accomplisse un acte ou un fait déterminé qui lui est étranger.
Par exemple : le fait de vendre sous la condition suspensive de l’octroi d’un prêt hypothécaire. Certes la volonté du débiteur est également un facteur déterminant puisqu’il va activement chercher la réalisation de la condition mais il va devoir poser une série d’actes (demandes de prêt aux banques). La volonté d’un tiers est également en jeu ici.
Les effets de la condition suspensive avant la survenance de l’évènement (pendente conditione)
Exigibilité de l’obligation suspendue
Cet effet ne demande pas plus d’explications que celles décrites ci-dessus.
Absence de recours en exécution forcée
Lorsqu’un débiteur ne s’exécute pas, le droit commun reconnait la possibilité pour le créancier de demander en justice l’exécution forcée de l’obligation en cause. Cependant, cette possibilité n’est ouverte que concernant les obligations pures et simples (sans terme suspensif ni condition suspensive).
Tant que l’évènement ne s’est pas réalisé, le créancier ne peut donc qu’attendre.
Suspension de la prescription
Tant que la condition est pendante, la prescription de l’obligation ne court pas. Si l’on est en matière contractuelle, le délai de prescription est en règle de 10 ans. Ce délai ne commence donc à courir que lorsque la condition s’est réalisée.
Actes conservatoires
Bien que l’exécution de l’obligation ne puisse être demandée, le code reconnait la possibilité pour les parties d’accomplir certains actes conservatoires. Les actes conservatoires permettent notamment de conserver le bien faisant l’objet de l’obligation durant cette période. Une assurance peut, par exemple, être souscrite.
Paiement avant la survenance de l’évènement
Dans le cas où le débiteur de l’obligation payerait avant la réalisation de la condition, celui-ci est admis à demander la répétition du paiement (le remboursement). Cette solution diffère de celle retenue concernant le terme suspensif. En effet, en ce qui concerne ce dernier il faut d’abord regarder en faveur de qui le terme a été stipulé. S’il a été stipulé en faveur du débiteur, celui-ci peut payer avant terme et ce payement n’est pas susceptible de répétition de sa part. Il y a également une présomption que le terme a été stipulé en faveur de cette personne.
Les effets de la condition suspensive lors de la survenance
L’exigibilité de l’obligation opère de plein droit et pour l’avenir conformément à l’article 5.147, alinéa 1er. Il ne faut donc aucune mise en demeure de la part du créancier, la réalisation de la condition opère les mêmes effets que cette dernière.
Empêchement et provocation de la réalisation de la condition
La condition est un évènement dont la survenance doit obligatoirement être étrangère à l’implication de l’une ou de l’autre partie. Il s’agit d’un évènement extérieur à celles-ci.
Empêchement
Dans certains cas, l’une ou l’autre partie influence négativement la réalisation de la condition. C’est-à-dire qu’une d’entre elles tente d’empêcher la survenance de l’évènement ou y arrive. Dans ce cas, l’article 5.144 prévoit que l’autre partie peut tenir la condition pour réalisée. On fera donc comme si l’évènement s’était produit.
Par exemple : reprenons le cas de notre vente immobilière réalisée sous condition suspensive de l’obtention d’un prêt hypothécaire. Si B ne cherche pas activement un prêt, qu’il ne demande pas à plusieurs banques un tel prêt, qu’il simule certaines demandes ou toute autre situation similaire par laquelle il montre un désintéressement ou tente d’empêcher la survenance de l’évènement, notre vendeur-créancier A pourra légalement considérer que la condition s’est réalisée.
En effet, la non-réalisation de la condition est alors imputable à l’acquéreur. Dans un tel cas, la situation est fâcheuse puisque le débiteur sera tenu de payer alors qu’il n’a pas reçu l’argent pour ce faire. Une doctrine majoritaire estime qu’il faudrait considérer la condition comme défaillie dans ce cas, et indemniser le créancier préjudicié. La responsabilité civile contractuelle pourrait donc s'appliquer.
Provocation
Lorsqu’une partie provoque par sa faute, la réalisation de la condition, l’autre partie peut la tenir pour défaillie. La défaillance de la condition a pour effet que l’obligation ne soit jamais exigible et celle-ci n’est donc plus juridiquement valable.
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